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Ua Pou : premiers pas aux Marquises





Voilà, on a foulé le sol des Marquises. 


Les Marquises… Un nom qui sonne comme un trésor enfoui très loin dans le Pacifique. 

Un nom qui dissimule du mystère, de la curiosité, une histoire, quelque chose de très tribal, de primitif, sans trop savoir ce qu’on va réellement y trouver. 

Cet archipel vient d’être enfin classé au patrimoine mondial de l’Unesco, à peine trois jours avant notre arrivée!


Notre première île sera Ua Pou, au sud ouest de Nuku Hiva. C’est déjà un sacré périple pour y parvenir! On se lève à 4h à Tahiti pour prendre un premier vol pour Nuku Hiva, la plus grande des îles Marquises. On débarque dans un tout petit aéroport, où on va devoir se faire peser en plus des bagages pour un compte minutieux. C’est un dans un petit coucou d’une quinzaine de places qu’on va poursuivre le chemin. Le pilote est aussi l’hôtesse de l’air. Il nous fait les démonstrations de sécurité sur le tarmac au pied de l’escalier, c’est un local qui est très drôle!! Sa présentation est un sketch, ça nous détend bien dans la mesure où l’on sent chez tout le monde une petite tension avant de monter. Basile est défait… « Et pour finir, sachez que si vous avez peur, moi aussi !!! » finit-il avant de monter dans son cockpit. Le ton est donné! On a chacun un casque pour se protéger du bruit, et nous voilà à traverser les nuages. Après une quinzaine de minutes, nous atterrissons d’abord sur Ua Huka, pour déposer quelques passagers (deux peut-être ?), l’aéroport est encore plus petit que Nuku Hiva, c’est très artisanal ! Puis on recommence, et voilà qu’en une vingtaine de minutes, Ua Pou se dessine. 

On aborde une côte aride, déchiquetée, et se dessinent déjà les guerriers de Ua Pou qui se dressent vers le ciel, les fameux pics du centre de l’île qui en font toute sa renommée et son relief si particulier. On dirait un château fort, cerné de donjons. Finie la platitude et la douceur des Tuamotu, ici c’est brut! 

La piste d’atterrissage est réputée pour sa technicité : elle fait face à la montagne, elle est en légère remontée, et trois types de vents contraires rendent son abord délicat, il faut une vraie expérience de l’atterissage en montagne pour pouvoir piloter ici. On a quelques frissons lorsque les roues s’apprêtent à toucher le tarmac, ça bouge pas mal, mais on a confirmation des passagers locaux avec nous que c’est une belle manoeuvre.

Avec une autre voyageuse, nous sommes les seuls touristes dans ce vol,  et on comprend tout de suite qu’on arrive en des terres qui vont être plus difficiles à apprivoiser!


Notre hôte Jérôme, un ancien militaire, vient nous chercher pour nous emmener sur la pension, à Hakahau, le village principal situé sur la côte est.

Il est un peu rude, à l’image des paysages, mais on sent vite qu’il va nous apprendre un tas de choses sur les îles Marquises, son regard s’allume dès qu’il aborde le sujet.

« Haka » signifie « Baie », et le nom de chaque village ici commence par ce préfixe.

Les premiers kilomètres sont déroutants: c’est très sec, on se croirait en Corse, en Grèce, parfois même on traverse des paysages de savane avec une lande jaunie par la sécheresse, alors que les baies qui défilent dévoilent un peu de leur potentielle splendeur, du gris clair sous le turquoise de l’eau. 

La pension est très jolie, elle jouit d’une situation parfaite en hauteur sur la baie, face aux pics qui sont pour moi totalement hypnotisants. Et pour le grand bonheur des enfants, il y a une petite piscine !


Ua Pou fait 15 km de long pour 10 de large, et abrite 2200 habitants.

Elle passe pour l’île la plus engagée dans la défense de la culture marquisienne, et commencer par elle va nous permettre un grand plongeon dans toutes les dimensions des particularités de ces îles polynésiennes, tant au plan géologique, climatique, océanographique, historique, archéologique, traditionnel qu’artisanal. Jérôme nous apprendra que les Marquises n’ont connu leur « virage de revendication culturelle » que très récemment, à la fin des années 70 pour commencer (avec la création de l’association Motu Haka, née ici à Ua Pou) puis vers 2015, où un franc virage a été pris par les jeunes générations: les voilà qui exhibent avec fierté leurs traditions marquisiennes, avec un haka plus violent notamment, comme une provocation envers leurs parents qui s’étaient tus si longtemps face à la conquête des colonisateurs puis des missionnaires européens.  Un virage qui n’a pas plu aux Marquisiens plus anciens, qui avaient toujours été éduqués dans l’idée que les traditions culturelles étaient tabou, interdites, et que tatouages et haka étaient des signes de mauvaise augure. 


On passe une première après-midi tranquille, on déambule dans Hakahau, d’un calme absolu, dominée par les pics dont je ne peux détourner le regard, on sent qu’on a basculé dans une autre dimension. Sculptures et tiki décorent les rues, les façades des bâtiments administratifs ont des couleurs vives, on passe par le centre artisanal qui est étonnamment très fourni et nous permet d’entrevoir que les Marquises ont un savoir-faire très varié en tissage et en sculptures sur bois et sur pierre. Des poignards en os de cochon et rostre d’espadon donnent le ton! Graines de tamanu sculptées, colliers de graines rouges dites graines l’Eglise, tiki en pierre fleurie, c’est très différent de ce qu’on a vu jusqu’alors dans le reste de la Polynésie.

On termine la journée par une petite balade au calvaire qui domine la pension, pour le coucher du soleil. Demain on apprendra une tonne de choses sur les Marquises en général et sur Ua Pou en particulier!


Notre dernière journée sera consacrée à sillonner l’île en autonomie : on passe par la baie de Hakanaii, surnommée Baie des Requins - de la route on aperçoit les silhouettes des chasseurs qui ondulent dans le turquoise à la recherche des poulpes; les paysages passent sans transition de la lande sèche d’acacias dans un décor méditerranéen à la jungle dense, sauvage, d’où émergent de hauts cocotiers, les quelques villages (Hakahetau, Haakuti, Hakamaii) sont nichés au fond des baies, face à la mer, dans un silence qui n’est perturbé que par les chant des coqs ou le bêlement des chèvres : bienvenue aux Marquises !






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